Recevoir un diagnostic de handicap ou de maladie chronique quand on est jeune adulte peut bouleverser profondément. Études, travail, relations, autonomie... tout semble soudain remis en question. Beaucoup se demandent : « Pourquoi moi ? », d’autres ressentent de la honte, de la peur ou une immense fatigue morale. Et c’est normal.
Après un diagnostic, il est normal d’éprouver des émotions fortes et contradictoires :
- Le choc : “Ce n’est pas possible.” “Il doit y avoir une erreur.”
- La tristesse : on fait le deuil de la vie qu’on imaginait, des projets qu’on pensait évidents.
- La colère : contre soi, contre les autres, contre le corps, parfois contre la vie.
- La peur : peur du regard des autres, de ne plus y arriver, de ne plus être “comme avant”.
- Le sentiment d’injustice : “Pourquoi moi, alors que d’autres peuvent vivre normalement ?”
Ces émotions ne sont pas des signes de faiblesse. Ce sont des réactions humaines à une perte de repères. Et elles peuvent durer longtemps. Parfois, des années après le diagnostic, la colère ou la tristesse peuvent encore être là. Et c’est important de le dire : on peut avancer même si tout n’est pas accepté. L’acceptation n’est pas une destination parfaite, mais un mouvement, un apprentissage qui continue. Il est important de se rappeler que vous n’êtes pas votre handicap. Il fait partie de vous, mais il ne vous définit pas entièrement. Vos qualités, vos passions et vos rêves restent vos forces.
À retenir :
• Ces étapes ne sont pas séquentielles. On peut osciller entre colère et acceptation pendant des années.
• La culpabilité ("J’aurais dû faire plus de sport/moins stresser/...") est fréquente. Elle reflète un besoin de sens, mais aussi l’intériorisation de stéréotypes sociaux sur la
"responsabilité" du handicap.
• Le deuil est un travail actif (Freud, 1917) : il ne s’agit pas d’oublier, mais de réinvestir son énergie psychique dans de nouveaux objets (projets, relations, activités).
Accepter son handicap n’est pas abandonner ses projets ou se déclarer vaincu. C’est apprendre à vivre avec, en reconnaissant ce qui a changé et ce qui reste possible. Accepter peut être comparé à l’apprentissage d’une nouvelle langue : maladroit au début, avec des erreurs et des retours en arrière, mais petit à petit, vous progressez. Cela consiste à :
- Dire « oui, j’ai ce handicap », mais refuser qu’il définisse toute votre existence.
- Reconnaître ce qui est perdu tout en explorant ce qui peut être reconstruit.
- Poser des limites et demander de l’aide si nécessaire, sans culpabiliser.
Pour les parents : Votre rôle n’est pas de "réparer", mais d’accompagner l’autodétermination.
Évitez les phrases comme :
• "Tu verras, tu vas t’y faire." (minimisation)
• "Tu es si courageux !" (infantilisation)
Préférez :
• "Qu’est-ce qui t’aiderait aujourd’hui ?"
• "Je suis là, même dans ta colère."
Certaines personnes vivent longtemps avec une douleur sourde : un mélange de fatigue, de nostalgie et de colère.
La tristesse peut revenir par vagues, surtout quand la vie rappelle ce qui a changé : une sortie annulée, un emploi inaccessible, un regard mal placé. La colère, elle, peut devenir une compagne de route, pas destructrice, mais persistante, une
colère qui dit “je n’ai pas choisi ça” et qui garde vivante une part de révolte. Ce n’est pas « mal » d’être encore en colère cinq ans après le diagnostic. Cela montre simplement que vous ressentez encore le poids de ce que vous avez perdu. L’essentiel est d’apprendre à transformer cette colère : la faire devenir énergie, revendication, force, plutôt que blessure.
Le diagnostic peut aussi créer un sentiment d’impuissance : impression de ne plus rien maîtriser, d’être enfermé dans une identité qu’on n’a pas choisie. Certains jeunes adultes disent : “Je ne contrôle plus rien, mon corps décide pour moi.”
Ce sentiment est profondément humain.
Ce qu’il faut savoir, c’est qu’on retrouve peu à peu du pouvoir sur soi-même, mêmedifféremment :
- en apprenant à mieux connaître son corps,
- en découvrant ses limites sans les craindre,
- en adaptant ses projets à son propre rythme,
- en se reconnectant à des choses simples, accessibles, mais significatives.
Reprendre du pouvoir, c’est souvent changer la manière de mesurer la réussite : ce n’est plus « faire comme les autres », mais « faire au mieux, avec ce que j’ai, ici et maintenant ».
Le regard extérieur peut être plus lourd que la douleur physique. Entre pitié, maladresse ou ignorance, il renvoie souvent à une différence que l’on essaie d’apprivoiser. Beaucoup de jeunes adultes racontent qu’ils ont dû apprendre à “exister autrement” : non pas en se cachant, mais en se redéfinissant. Changer le regard sur le handicap passe aussi par le fait d’en parler, de témoigner, d’occuper l’espace social avec sa singularité. La société a encore à apprendre, mais chaque voix qui s’exprime fait évoluer les mentalités.
Le handicap expose à des réactions sociales stéréotypées :
• La pitié : " Mon pauvre !" → Nie la compétence de la personne.
• L’évitement : "Je ne sais pas quoi dire, alors je disparais." → Renforce l’isolement.
• L’héroïsation : "Tu es une inspiration !" → Pressure à être "extraordinaire" pour être accepté.
Stratégies pour les jeunes adultes :
• Choisir ses combats : Répondre aux remarques maladroites par l’humour ("Oui, mon fauteuil est un accessoire de mode !") ou l’éducation ("En fait, je préfère qu’on me demande plutôt que de supposer").
• Créer des alliances : S’entourer de personnes qui normalisent le handicap (ex : amis
qui disent "On va au cinéma ?" plutôt que "Tu peux venir au cinéma ?").
Pour les parents :
Modélisez une attitude neutre et positive :
• "Ton handicap fait partie de ta vie, comme tes talents ou tes défis."
• Évitez de parler à la place de votre enfant adulte en public.
Selon la Haute Autorité de Santé (HAS, 2022), le diagnostic provoque souvent une crise existentielle, comparable à un deuil : choc, déni, colère, puis réorganisation. Le passage à l’âge adulte intensifie ces émotions, car l’identité est encore en construction.
Le processus d’acceptation suit généralement quatre phases :
1. Sidération : tout semble s’effondrer.
2. Déni : souvent nécessaire pour amortir le choc.
3. Recherche de sens : comprendre son diagnostic, s’informer, dialoguer avec des pairs.
4. Acceptation : reconnaître sa différence, ses besoins et ses forces, sans se réduire à son handicap.
7. Prendre soin de soi au quotidien, même quand c’est difficile
L’acceptation se construit à travers de petites actions quotidiennes :
- Accueillir ses émotions : pleurer, écrire, dessiner, écouter de la musique, respirer profondément... tout cela aide à gérer le stress.
- Établir des repères : rythme régulier, rituels quotidiens simples, moments de plaisir (lecture, balade, activité artistique).
- Surveiller sa santé : suivre les soins médicaux et la rééducation, noter ce qui fatigue ou soulage, adapter son quotidien en conséquence.
- Fractionner les objectifs : décomposer les projets en étapes réalistes et célébrer chaque petite victoire.
Ces gestes ne résolvent pas tout, mais ils permettent de garder un ancrage dans le présent,
surtout dans les périodes où tout semble flou.
L’isolement est l’un des aspects les plus difficiles à vivre après le diagnostic. Il est important de :
- Trouver des espaces d’échanges où parler librement, en personne ou en ligne, modérés et bienveillants.
- Chercher le soutien de proches ou de professionnels qui écoutent sans juger.
- Consulter un psychologue ou un médecin si la colère ou la tristesse deviennent envahissantes.
Le soutien social est l’un des piliers les plus puissants de la reconstruction. Il ne s’agit pas d’être entouré de beaucoup de monde, mais de s’entourer des bonnes personnes : celles qui ne jugent pas, qui écoutent sans chercher à “réparer”. En effet, créer un environnement bienveillant permet de renforcer l’estime de soi et de favoriser l’auto-acceptation.
Chercher de l’aide ne signifie pas qu’on va mal, cela signifie qu’on veut avancer.
Le handicap peut nécessiter d’adapter certains aspects de la vie, mais il n’empêche pas d’avoir des ambitions.
Pour se reconstruire :
- Réévaluer ce qui est important, explorer de nouvelles passions.
- Chercher des adaptations concrètes : matériel, organisation, aides techniques.
- Planifier à son rythme : se fixer des objectifs atteignables, prévoir des alternatives.
- Écouter son corps et accepter que les capacités et envies évoluent avec le temps.
- Association LÉA : Numéro gratuit pour écoute au 0 805 950 874